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Webthéâtre - Union imprévue de Leos Janacek avec Papusza, poétesse Rrom

Webthéâtre - 10 avril 2016
Par Caroline Alexander

JPEG - 363.3 koAprès La petite renarde rusée créée à Nanterre en jan­vier der­nier (voir WT 4960) et tou­jours sous les aus­pi­ces de l’Arcal (com­pa­gnie natio­nale de théâ­tre lyri­que et musi­cal), Louise Moaty pour­suit son pèle­ri­nage autour des œuvres tar­di­ves de Leos Janacek (1854-1928) avec Le Journal d’un dis­paru com­posé à l’âge de 68 ans. Une œuvre dif­fé­rente, une forme dif­fé­rente. Cette fois il ne s’agit pas n’est pas d’un opéra mais d’un cycle de 22 chants pour ténor, alto solo et voix de femmes. Elles gar­dent un point commun : l’étrangère, la femme venue d’ailleurs.

La renarde sau­va­geonne était ori­gi­naire des forêts, la belle tzi­gane qui fas­cine le jeune paysan du Journal d’un dis­paru appar­tient au clan des mar­gi­naux que sont les gens du voyage… Le cycle de chants raconte leur ren­contre, leur pas­sion par­ta­gée et le goût de liberté qui enivre leur rela­tion.

Louise Moaty lui donne chair et voix par l’intru­sion des textes d’un auteur peu connu en France : Bronislawa Wajs dite Papusza (Poupée), poé­tesse Rrom et polo­naise (1908-1987) dont les paro­les et la pré­sence vont donner rêve et réa­lité aux chants d’amour et d’espoir du « dis­paru ». La culture rrom est si peu connue… les poèmes de Papusza sont de lumière et de trans­pa­rence. Simples. Directs : « Je suis tzi­gane et la nuit noire est ma sœur la plus natu­relle ». Elle avait 20 ans à la mort de Janacek, elle fut donc, par­tiel­le­ment, sa contem­po­raine et sa voix, redé­cou­verte par Louise Moaty l’accom­pa­gne pres­que natu­rel­le­ment.

JPEG - 155.4 koEn deux phases : une sorte de pré­lude parlé où les trois pro­ta­go­nis­tes du spec­ta­cle, le pia­niste Ienissei Ramic, le ténor Paul Gaugler et la mezzo-soprano Albane Carrère lisent les cou­plets rédi­gés par Papusza durant la seconde guerre mon­diale quand Hitler et ses sbires assas­sins des­ti­naient à la même solu­tion finale juifs et tzi­ga­nes. Une écriture sans pathos mais qui irra­die comme le feu dans lequel le trio jette les pages lues.

Puis place, sans tran­si­tion, au Journal d’un dis­paru. Le pia­niste rejoint son ins­tru­ment – l’œuvre a été écrite pour un accom­pa­gne­ment d’un seul piano – Paul Gaugler bien­tôt rejoint par Albane Carrère, se fau­file au milieu de bottes de pailles toutes en hau­teur qui ser­vent à la fois de décor et de par­te­nai­res aux deux solis­tes. Une for­mule mobile, faci­le­ment trans­por­ta­ble d’un lieu à l’autre d’une tour­née et qui, lors de la pre­mière sur la scène récem­ment réno­vée de la Péniche Opéra – rebap­ti­sée POP – s’est trou­vée un peu à l’étroit dans la cour­sive navi­gante. Mais très vite, la sou­plesse - phy­si­que et vocale – des deux inter­prè­tes en a dompté l’exi­guïté.

JPEG - 118.8 koClarté mêlée de vio­lence inté­rieure de Paul Gaugler, sen­sua­lité et cha­leur de la féline Albane Carrère qui passe de la langue tchè­que chan­tée de Janacek aux vers écrits en rrom par Papusza, avec une dic­tion et une faci­lité déconcer­tante. Elle est dou­ble­ment la Tzigane. Sur son cla­vier, Ienissei Ramic, 26 ans, fait alter­ner étincelles jazzy, har­mo­nies clas­si­ques et les efflu­ves popu­lai­res de la si géné­reuse musi­que de Janacek. En cou­lis­ses un chœur de trois filles en sou­li­gne les vibra­tions….

Spectacle inat­tendu et révé­la­teur d’une voix igno­rée, ce Conte de Liberté assorti du Journal d’un dis­paru pour­sui­vra sa route en tour­née notam­ment au Festival d’Ile de France en octo­bre pro­chain à la Ferme d’Avrainville. (91)

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